L’âme d’une momie égyptienne
(source Wikipédia)
C’était une fin de matinée en 197… Il parlait allongé sur le dos, un peu comme ce personnage de roman à l’aube de sa métamorphose. Soudain, les objets, le cadre et les êtres s’éloignèrent comme pour rejoindre un autre monde, séparé par une surdité enveloppante. Sa voix devint prisonnière de son corps, se transmuant en organe caverneux, immobilisé, paralysant. Elle lui était devenue étrangère par ses sonorités, tout en demeurant la sienne par le contrôle qu’il en avait, par son vocabulaire, son phrasé. Il pensait avoir déjà vécu cette sensation, mais avant le temps de sa vie ou bien ailleurs, dans le monde de ses rêves ou des limbes. Il continua de parler, tenta de chasser cette étrange paralysie par l’un ou l’autre mot qui la démasquerait, la nommerait, la ferait tomber. Comme l’on tente de faire disparaître un envoûtement par une formule magique. Mais rien ne vint, rien ne viendrait jamais la faire s’évanouir en la nommant ou en faisant surgir sa vraie nature. C’était comme une ombre ancienne, qu’un agencement singulier des lieux et des lumières lui avait révélée, et qui s’était emparée de son être. Il finit par se lever et se défaire de l’organe caverneux en secouant son corps. Sa marche le remit d’aplomb dans ce monde amoindri.
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