Aux couleurs de Novgorod

Sainte-Sophie à Novgorod
(source Wikipédia)

« Un vieux moine me lisait la légende de Novgorod
J’avais soif »

Blaise Cendrars,
La prose du Transsibérien et de la petite Jehanne de France

Le joueur d’échecs russe, Gary Kasparov, était l’invité de l’émission « 28 minutes » sur Arte, ce 25 janvier 2023. Opposant déterminé à Poutine et réfugié aux États-Unis, il arborait un petit drapeau de couleur bleue et blanche sur sa poitrine. Sans le rouge. Le détail a sans doute échappé à beaucoup de spectateurs, peut-être également aux journalistes. Mais il s’agit là des couleurs de la ville de Novgorod, que brandissent de plus en plus les opposants russes au régime poutinien, de leur exil. Il ne s’agit pas de la ville de Novgorod d’aujourd’hui, ni de celle de la légende du vieux moine, évoquée par Blaise Cendrars dans La prose du Transsibérien, mais du « Grand Souverain » Novgorod, écrasé par les autocrates Ivan III et son petit fils Ivan IV, dit « le Terrible ». C’était une république, du moins selon les critères de l’époque. Elle était le comptoir le plus oriental de la Ligue hanséatique et la première capitale de la Rous’, avec Kyiv. D’une certaine manière, l’autocrate Poutine Ier rejoue vis-à-vis de l’Ukraine ce qu’Ivan le Terrible avait fait de Novgorod : la détruire. Remontons vers la Novgorod historique, puis sa destruction par Ivan IV, en établissant des comparaisons avec l’Ukraine.

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Ukraine : d’Holodomor à la dénazification

Affiche en mémoire de Gareth Jones
(Institut ukrainien de la mémoire nationale, 2015)

« Le massacre des peuples et des nations, qui a marqué l’avancée de l’Union soviétique en Europe, n’est pas un trait nouveau de sa politique expansionniste (…). Ce fut plutôt une caractéristique à long terme, y compris de la politique intérieure du Kremlin, dont les maîtres actuels avaient trouvé d’abondants précédents dans les opérations menées par la Russie tsariste. C’est en effet une étape indispensable du processus d’ »union » que les dirigeants soviétiques espèrent naïvement voir produire « l’homme soviétique », la « nation soviétique » et, pour parvenir à cet objectif, celui d’une nation unifiée, les chefs du Kremlin détruiront joyeusement les nations et les cultures présentes depuis longtemps en Europe orientale. »

Raphael Lemkin, Le génocide soviétique en Ukraine, 1953
(conférence de Lemkin, citée par Applebaum)

Aux morts et aux survivants, à l’obstination de Gareth Jones

ой у лузі червона калина
Version sous-titrée en anglais

Après avoir abordé ce sujet à plusieurs reprises, notamment dans La Revue nouvelle, je reviens aujourd’hui, dix mois après l’invasion russe du 24 février 2022, sur la famine de 1933 en Ukraine et au Kouban. Cela sur base du livre d’Anne Applebaum, Famine rouge. La guerre de Staline en Ukraine (2017). Un ouvrage volumineux, rigoureux, incarné et très documenté, qui situe la famine de 1933 dans une large séquence historique, de février 1917 à 2017. Mais qui détaille également l’agression de Staline contre la langue, la culture et les élites ukrainiennes, concomitante à celle dirigée contre la paysannerie, ses biens et ses traditions. Enfin, l’ouvrage se termine par l’histoire de la négation de la famine par l’URSS et par une partie de l’Occident, sur base du « nazisme » supposé des Ukrainiens. Cela à partir de 1987 – voire dès l’occupation nazie – avec la parution de Fraud, Famine and Fascism : The Ukrainian Genocide Myth from Hitler to Harvard, ouvrage d’un syndicaliste canadien, Douglas Tottle, avec le soutien soviétique. Un contre-feu allumé en riposte au livre de Robert Conquest, Sanglantes moissons (1986). Le roman accablant de Vassili Grossman, Tout passe (1960, saisi par le KGB), n’avait pas encore été publié. Quels liens peut-on établir entre 1933 et 2022 ?

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Des grands-mères aux grands jours

Mise en meule du foin dans les Carpates d’Ukraine
(photographie de l’auteur)

Voici une nouvelle série d’extraits du livre Les Carpates oubliées, avec mon texte et mes photographies. J’y ai rassemblé quelques pages relatives aux saisons dans le pays Houtsoule. Trois périodes structurent le livre et correspondent à nos trois séjours dans cette région située au nord de la Transcarpatie (Ukraine) : « l’été des grands-mères » qui correspond à notre été indien ; « mascarades » est relatif à l’hiver autour de Noël, période pendant laquelle les enfants se déguisent en animaux fantastiques ; « les grands jours » autour de la fête de Pâques et des fêtes soviétiques. Ces moments de l’années sont rythmés par les travaux agricoles (automne et printemps) et par les fêtes religieuses (Noël et Pâques) ou soviétiques (Victoire de la Grande Guerre patriotique). Une partie du séjour d’automne s’est faite de l’autre côté des Carpates ukrainiennes, près de la frontière roumaine (Maramureș). Je n’ai pas modifié le texte de 2002, même si je n’écrirais plus les choses de la même façon aujourd’hui. Quant à demain…

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Peuples frères : l’espace et le temps

Couverture de la version française (source CNRS éditions)

« Je n’imagine pas de pays plus beau que la Petite-Russie. Ce qui me plait surtout, c’est de savoir qu’elle n’a plus d’histoire, son aventure historique est achevée depuis longtemps et pour toujours »

Ivan Bounine (prix Nobel de littérature, 1933), La vie d’Arséniev, 1927

« Sais-tu à qui tu parles, ou l’as-tu oublié ?
Je suis la Russie ! Pourquoi ne me respectes-tu pas ? Comme si tu appartenais à une autre Russie et non à moi ! »

Dialogue entre la Grande Russie et la Petite Russie
Semen Divovytch, 1762 (cité par Kappeler)

(Divovytch est un ancien membre de l’Académie de Kyiv, prédécesseur de l’université nationale « Académie Mohyla de Kiev », fondée en 1632)

Le narratif poutinien sur « les peuples frères » russe et ukrainien – sans oublier les Biélorusses – plonge ses racines dans l’histoire et la géographie. La Trinité du Russe « Grand », « Petit » et « Blanc » formant l’unité du peuple russe, du berceau kiévien jusqu’à la guerre actuelle de « réunification », est pulsée par une chronique séculaire d’écarts et de rapprochements. La Grand Frère voit le Petit se déporter à de nombreuses reprises vers ses voisins polono-lituaniens ou austro-hongrois, puis chercher sa protection pour sauvegarder son autonomie cosaque et son orthodoxie. En toile de fond de cette histoire sinueuse, une très ancienne et fondamentale divergence, qu’il convient de retracer dans ses lignes de force avec l’aide de l’historien autrichien Andreas Kappeler, auteur d’un très éclairant Russes et Ukrainiens, les Frères inégaux. Ce livre en langue allemande, publié en 2017, a été traduit en 2022, l’année de « l’opération militaire spéciale » visant à faire revenir de force le cadet dans le giron du grand frère, quitte à l’anéantir sous motif de « dénazification ». Ce dernier qualificatif a également sa spatio-temporalité, recoupant la première dans le drame familial.

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« Le Dachau de Donetsk »

Couverture du livre Le chemin radieux de Stanislav Asseyev en langue ukrainienne
(source Old Lion Publishing House, Lviv)

« Avec l’arrivée à Donetsk du « monde russe » et du FSB, Lénine et son « chemin radieux » l’ont emporté : la route vers le paradis communiste s’est de nouveau transformée en enfer avec sa cave. Le réseau des abris atomiques de l’époque soviétique de l’ancienne usine s’est transformé en réseau de tortures…  »

« Peut-être faut-il pousser jusqu’au point où toute l’Ukraine serait submergée d’un flot ininterrompu de cruauté qui ferait les gros titres de la presse internationale. Quelle « profonde préoccupation » de nos alliés les pousserait enfin à ressentir le froid glaçant des souffrances qu’exhale le Donbass, où l’on ne peut plus se contenter de mots mais où il y a besoin d’actes. »

Stanislav Asseyev, Donbass. Un journaliste en camp témoigne

Le récit glaçant d’un journaliste ukrainien, Stanislav Asseyev, sur sa détention à Donetsk de 2017 à 2019, en dit long sur la cruauté de la répression qui y est mise en œuvre. Il était resté au Donbass après la sécession des « républiques populaires autoproclamées » en avril 2014 – celle de Louhansk (LNR) et celle de Donetsk (DNR). D’autres évènements récents, comme les témoignages sur les « centres de filtration » russes ou le massacre de 53 prisonniers de guerre, rescapés de l’usine Azovstal de Marioupol, à Olenivka, recoupent les pratiques de terreur et de violence du pouvoir russe et des républiques populaires associées au Donbass. Mais avant de restituer les lignes de force du témoignage d’Asseyev, il est nécessaire de retracer l’histoire du Donbass et de la sécession des deux républiques, en particulier celle de Donetsk. Ainsi que de tenter de discerner ce qui s’y passe depuis près de huit ans. Précisons que l’expression « Dachau de Donetsk » est utilisée par un voisin de détention d’Asseyev, pour désigner les conditions de survie dans la prison secrète d’Isolatsia, une ancienne usine de matériaux d’isolation. Enfin, le titre original du livre en ukrainien est « Le chemin radieux » : Histoire d’un camp de concentration.

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Comme Dieu à Iassinia

L’église Ivan Strouk à Iassinia
(photographie de l’auteur, 1999)

« C’est à travers les détails que l’on peut tout montrer,
une goutte d’eau reflète l’univers »
Ryszard Kapuściński, Le Shah

Voici d’autres extraits du livre Les Carpates oubliées. J’y ai rassemblé quelques pages relatives à la religion dans la capitale du pays Houtsoule. Pour le sociologue passionné par l’expérience et le fait religieux, la vallée et ses villages furent un terrain très éclairant. Non seulement sur les pratiques cultuelles, mais aussi sur leurs liens avec la structuration sociale et politique, notamment sa plus ou moins grande verticalité, la hiérarchie entre les clercs et les fidèles, les hommes et les femmes, l’individu et le groupe, l’autonomie et l’hétéronomie. Le pope Andreï nous a ainsi dit sans détour que, pour le futur de l’Ukraine, il était un ferme partisan de l’abolition de la séparation entre l’Église et l’État. Lors de nos séjours, trois Églises de rite orthodoxe cohabitaient : celle du patriarcat de Kyiv, celle du patriarcat de Moscou et celle des gréco-catholiques (uniates) rattachés à Rome. La minorité hongroise était catholique romaine. Sa sociabilité et les célébrations religieuses étaient très différentes. J’ai également visité la « Salle du Paradis » des Témoins de Jehovah, dont je n’ai pas de photos. Iassinia comptait une importante communauté juive (près de quinze cents personnes à la fin des années 1930, selon mes sources), dont une partie fut expulsée en Galicie par l’armée hongroise, et livrée de ce fait aux nazis. Elle y fut exterminée par les Einsatzgruppen, dont trois cents dans la ville de Kamenets-Podolski en août 1941. Après la prise de la région par les Allemands en mars 1944, les Juifs vivant encore à Iassinia furent déportés vers les camps. Je n’ai pas modifié le texte de 2002, même si je n’écrirais plus les choses de la même façon aujourd’hui. Quant à demain…

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Tsiganes en pays houtsoule

Le mont Goverla, Everest de l’Ukraine
(photographie de l’auteur, hiver 2001)

Dans le contexte de la nouvelle invasion russe de l’Ukraine – la première date de 2014 – et de la focalisation sur ce pays que je connais depuis 1991, il me semble intéressant de diffuser en ligne des extraits du livre, que j’ai publié avec le photographe Nicolas Springael il y a vingt ans. L’idée de cet ouvrage associant textes et photographies, Les carpates oubliées, m’est venue après mon second voyage en Ukraine, durant l’été 1993. J’avais voulu retrouver mon ami Igor à Lviv en passant par les Carpates, la vallée de la Tisza noire rejointe en train et en bus depuis Budapest et Uzhgorod, puis les montagnes traversées en randonnée de Rachiv à Iassinia (capitale du pays houtsoule). Un voyage émouvant dans un pays inconnu des Européens, voire « fantomatique », meurtri par une crise géopolitique, sociale et économique profonde. J’y suis retourné avec Nicolas en 1999 pour réaliser notre projet. Nous avons séjourné pendant trois saisons différentes (automne, hiver et printemps) dans le bourg de Iassinia et ses environs, le pays houtsoule. Les extraits que je publie ici, avec mes photographies, concernent la communuauté tsigane de Iassinia, découverte par hasard. Nous lui avons rendu visite trois fois et elle figure en bonne place dans le livre. D’autres extraits des Carpates oubliées suivront. Il s’agit du texte de 2002 que je n’ai pas modifié, même si je n’écrirais plus les choses de la même façon aujourd’hui. Quant à demain…

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Un voyage à Kharkiv et Donetsk

Carte topographique de l’Ukraine. Kharkiv est en haut et Donetsk en bas à droite. Toutes deux sur la rive gauche du Dniepr (Source Wikipédia)

L’actualité brûlante n’invite pas aux excursions en Ukraine, mais ce n’est pas de cela qu’il s’agit ici. Durant l’été 2006, dans le cadre d’un dossier de La Revue nouvelle consacré à l’Ukraine, j’ai fait le tour du pays, que je connaissais depuis 1991 (notamment Kyiv, Soumy, la Transcarpatie, la Galicie, Odessa et la Crimée). Mon voyage en deux boucles m’a conduit de Kyiv à Lviv, puis de Kyiv à Donetsk, en passant par Chernivtsi, Lviv, Rivne, Poltava et Kharkiv – ainsi que deux villages en Bucovine du nord et en Galicie. Ce récit dans sa totalité a été publié sous le titre « Voyage au pays des deux rives » dans le dossier « Où va l’Ukraine ? » de La Revue nouvelle. C’était après « la Révolution orange » mais avant Euromaïdan et la rétorsion russe de 2014, en Crimée et au Donbass. Dans le contexte actuel de l’invasion visant l’ensemble du pays, je publie ici la partie concernant Kharkiv (seconde ville d’Ukraine aujourd’hui encerclée par les troupes russes qui commettent des crimes de guerre et bombardent des civils) et Donetsk (séparé de facto de l’Ukraine). Je n’ai rien changé au texte, qui reflète ma perception de l’époque que chacun pourra juger, en fonction de l’actualité et de ses connaissances. L’attrait pour l’Europe, en particulier, était beaucoup plus faible à Kharkiv en 2006 qu’aujourd’hui. J’y ai ajouté des images, ainsi que des liens concernant la famine de 1933. (texte écrit en mars 2022 ; la situation a changé depuis, comme le montrent les cartes ci-dessous mises à jour régulièrement)

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Retour au Livre de Samuel

Couverture originale du livre de Huntington (source Wikipédia)

À la mémoire d’Hervé Cnudde, ancien camarade de La Revue nouvelle

« À mesure que la puissance de l’Occident décline, sa capacité à imposer ses concepts des droits de l’homme, du libéralisme et de la démocratie sur les autres civilisations décline aussi, de même que l’attrait de ces valeurs sur les autres civilisations »

Samuel Huntington, Le Choc des civilisations, 1996

« La Russie n’a pas seulement défié l’Occident, elle a montré que l’ère de la domination occidentale mondiale peut être considérée comme complètement et définitivement révolue »

Texte devant être publié après la victoire sur l’Ukraine par l’agence russe Novosti et accidentellement mis en ligne, traduit par Fondapol, mars 2022

« À partir de maintenant, la Russie suivra sa propre voie, sans se soucier du sort de l’Occident, en s’appuyant sur une autre partie de son héritage : le leadership dans la décolonisation mondiale. La Russie peut nouer des partenariats et des alliances avec des pays que l’Occident a opprimés pendant des siècles… Sans le sacrifice et la lutte des Russes, ces pays n’auraient pas été libérés. La dénazification de l’Ukraine est en même temps sa décolonisation. »

Timofeï Sergueïtsev, idéologue du régime russe, avril 2022

« Nous devons fermement nous tenir à distance des pensées occidentales erronées comme « la séparation des pouvoirs » et « l’indépendance de la justice ».

Zhou Qiang, président de la Cour suprême chinoise, janvier 2017

« Notre Constitution n’est qu’un patchwork encombrant et hétérogène de différents articles en provenance de différentes constitutions occidentales. Elle ne comprend absolument rien qui puisse être considéré comme nous étant vraiment propre. Y trouvons-nous une seule référence dans ces principes directeurs de ce qui est notre mission nationale et notre référence centrale dans la vie ? Non ! »

Golwalkar, leadeur du RSS (Organisation paramilitaire nationaliste hindoue dont Narendra Modi, Premier ministre de l’Inde depuis 2014, fut membre), Bunch of Thoughts, 1966

« Une autre direction de l’humanité s’impose ! La direction de l’humanité par l’Occident touche à sa fin, non parce que la civilisation occidentale a fait faillite sur le plan matériel […] mais parce que le monde occidental a rempli son rôle et épuisé son fonds de valeur qui lui permettait d’assurer la direction de l’humanité […] L’islam seul est pourvu de ces valeurs et de cette ligne de conduite »

Sayyid Qutb, Jalons sur la route de l’islam, 1964
Qutb est un des idéologues majeurs des Frères musulmans

« J’ai cette image : l’Europe doit passer du temps des missionnaires au temps des monastères. Nous devons passer d’une logique d’expansion et de persuasion à une logique où il nous faut réfléchir à bâtir une enclave alternative, préservée autant que possible des pôles géopolitiques qui sont devenus trop puissants pour nous, espérant qu’après un cycle, l’Europe va retrouver son attractivité parce qu’elle aura su préserver son organisation sociale, ses valeurs politiques et économiques »

Ivan Krastev, Philosophie magazine, novembre 2021

Rarement lu par ceux qui le vouent aux gémonies, souvent mal compris par ceux qui s’en revendiquent, le livre, publié en français sous le titre Le Choc des civilisations (1997), fut même considéré comme une « prophétie auto-réalisatrice » lorsque les faits lui donnèrent raison. Singulier pouvoir d’une étude, d’abord publiée sous forme d’article dans la revue Foreign Affairs à l’été 1993. Une imputation de performativité du type : « C’est celui qui le dit qui le fait ». À l’heure où la géopolitique prend, plus que jamais, l’allure de conflits géoculturels, notamment entre le monde démocratique « décadent » et des puissances autocratiques ou hétéronomes comme la Chine, la Russie, l’Inde, l’Iran, la Turquie (pour ne parler que d’elles), il nous semble nécessaire de revenir sur ce livre. Son auteur avait, il y a près de trente ans, pressenti le conflit majeur entre la Chine et les États-Unis, mais également la « guerre frontalière » entre la Russie et l’Europe au sein de l’Ukraine. Taïwan et l’Ukraine sont des zones de conflits entre blocs civilisationnels, selon Samuel Huntington. Nous aborderons ces deux situations emblématiques, après avoir résumé le contexte et les thèses du livre, en revisitant son paradigme qui en cache peut-être un autre. Cela sans esquiver une interrogation finale sur les notions d’universel et de pluriversel que permet le recul temporel.

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Tchornohora – saison d’automne

Notre ami Ivan à l’aube, après le fauchage (photographie de l’auteur)

Voici la troisième saison au pays de la Montagne noire, celle d’automne qui fut en fait la première. Une brève présentation de ce petit pays a été faite pour la saison d’hiver. Pour rappel, j’ai découvert cette région en 1993 et y suis retourné trois fois avec un photographe bruxellois, Nicolas Springael. Ces voyages ont donné naissance à un livre, Les Carpates oubliées. Trois saisons au pays de la Tisza noire, publié en 2002. Les photographies en noir et blanc étaient de Nicolas et j’avais écrit le texte. Ayant retrouvé mes diapositives dans un coffre, je les ai numérisées. Celles qui sont présentées ici datent de septembre 1999. Elles sont relatives à l’une des trois saisons composant le livre. Il n’y a que quelques images choisies, pas de récit sur ce que j’ai vécu et perçu lors de ces quatre voyages (le premier en 1993). Avec leurs habitants, dans les villages, les églises, les fermes, les trains, les vallées et parfois au sommet des montagnes. Sans oublier la palinka samogon (vodka maison, le mot palinka est hongrois). Tout cela se trouve dans la centaine de pages du livre. La première image montre mon ami Igor Zhuk, auteur-compositeur vivant à Kiev, quittant la région après notre installation. C’est grâce à lui que ce voyage a été possible, et que j’ai appris à connaître l’Ukraine.

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